22 de setembro de 2015

Bulletin de l'ASREEP-NLS, nº 7 : Congrès NLS à Genève. Le sujet mélancolique de la crise, par Miquel Bassols




Une constatation que nous avons tirée à partir de quelques interventions dans le récent Congrès de la NLS à Genève sur « Moments de crise » est que le sujet de la crise actuelle apparaît très souvent dans la clinique avec des traits mélancoliques, voire même comme un sujet décidément mélancolisé, plongé dans sa propre hémorragie libidinale imparable.

Notre collègue grecque, Anna Pigkou, a remarqué ainsi que nous rencontrons « un nombre non négligeable de patients mélancoliques dans notre pratique quotidienne ». Du même, notre collègue d’Irlande, Joanne Conway, a signalé l’épidémie suicidaire qui hante les adolescents du temps de la crise du Celtic Tiger : « L’Irlande a maintenant l’un des plus hauts taux de suicide parmi les adolescents en Europe », avec un fait nouveau que ces actes suicidaires se succèdent « en groupe », signe d’une identification groupale à l’objet impossible à perdre.

La dette devient ainsi un concept « ambocepteur », comme l’a indiqué Reginald Blanchet dans le travail préparatoire du Congrès. C’est la dette économique qui hante les pays les plus plongés dans la crise, mais aussi la dette que le sujet doit symboliser dans son rapport au désir de l’Autre.

Une nouveauté dans l’économie moderne est que la dette, elle-même, devient un objet de transaction commerciale, un objet dont on peut tirer un bénéfice. C’est même l’invention de la machine financière moderne de commercialiser non seulement les services des biens et les marchandises, mais de commercialiser aussi la dette. C’est une sorte d’alchimie économique où l’on fait d’un moins, d’un manque, un plus, un objet qui peut être commercialisé. Mais c’est aussi, comme nous l’avons vu à partir de quelques vignettes cliniques, une alchimie libidinale où chaque sujet se trouve confronté à la question : comment faire d’un moins la cause d’un gain, d’une création ?

Remarquons un fait de structure où l’identification à l’objet impossible à symboliser comme objet perdu, séparé du sujet, semble corrélative d’une économie libidinale fondée sur une « gestion de la dette » qui pousse à la rendre impossible à payer. Ceci correspond à la définition de la dette symbolique par excellence, celle que la castration de l’Autre représente pour le sujet. C’est avec cet euphémisme « gestion de la dette » qu’on désigne aujourd’hui l’hémorragie économique qui hante les pays frappés de plein fouet par la crise.

Nous avons dit « corrélative ». Ceci ne veut pas dire un rapport de cause-effet, mais un signe de la rencontre, de la tuché, entre la singularité du sujet et la façon hémorragique du pousse-à-la-jouissance qui suppose cette nouvelle forme de l’impératif du surmoi demandant à ce sujet de jouir toujours davantage.

Toujours un peu plus signifie aussi qu’il n’y a jamais de perte possible, à moins que le sujet lui-même s’identifie à l’objet de cette perte impossible à symboliser.

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